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Tabou et euphémismes

Le mot tabou est d’origine polynésienne signifiant « sacré » et « interdit ». Il s’applique aux personnes, aux animaux et aux choses frappés d’interdiction due à des contraintes religieuses ou sociales et les rend, ainsi, inviolables.

Par superstition ou par crainte d’appeler un malheur les peuples primitifs évitaient de prononcer nombre de mots considérés comme « sacrés ». Le nom d’un chef de tribu, p.ex., devenant « tabou » après sa mort. De même, il était interdit de prononcer les noms de certains animaux ou objets. Le célèbre linguiste français J.Vendryes écrit à ce propos :

« Il y a en irlandais une douzaine de noms pour l’ours et autant pour le saumon : ce sont deux animaux que l’imagination populaire avait fait tabous. En général, les animaux que l’on chasse sont investis de pouvoirs magiques : nombreux sont les tabous des chasseurs. Aussi les animaux sauvages sont-ils souvent désignés par des synonymes »1.

Les tabous ont disparu dans la société civilisée, mais ils ont laissé des traces sous forme d’euphémismes.

Le terme euphémisme est d’origine grecque, eu – bien et phêmê – parole. Dans toute communauté il y a des notions qu’on évite de nommer directement. On a donc recours à toutes sortes de circonlocutions, de substitutions et d’allusions pour atténuer ou voiler l’expression de certaines idées ou de certains faits dont la crudité aurait quelque chose de brutal, de désagréable ou de malséant.

L’euphémisme est dicté tantôt par la décence, la politesse, la prudence, tantôt par quelque crainte superstitieuse. Par conséquent, l’interdiction frappe deux grandes catégories de notions :

  1. euphémismes de superstition,

  2. euphémismes de décence, de politesse.

Les euphémismes de superstition sont moins nombreux en comparaison avec ceux de décence ou de politesse. Par exemple, on remplace volontiers par des périphrases euphémiques tout ce qui se rapporte à la mort. Si on ne peut rien changer à la réalité brutale, on veut au moins essayer de la représenter sous un jour moins cruel. Alors on évite le mot mort et on le remplace par des périphrases, tels que : l’éternel repos, l’éternel sommeil, le grand voyage, l’adieu suprême, le départ sans retour, etc.

Les euphémismes de décence ou de politesse sont sans doute moins anciens. Et si les euphémismes de superstition perdent constamment du terrain, le nombre des euphémismes de décence va toujours en augmentant. On voile les vices et les défauts, les crimes et leur punition. Les périphrases humoristiques pour désigner l’ivresse sont innombrables : être un peu gris (gai, attendri, ému), avoir du vent dans les voiles, se donner un coup de soleil, être parti pour la gloire, être dans les vignes du Seigneur, se salir le nez, ne pas trouver son niveau, etc. Le manque d’argent s’exprime de manières suivantes : avoir un flux de bourse, loger le diable dans son porte-monnaie, tirer le diable par la queue. Au lieu de dire voler on emploie commettre une indélicatesse, travailler, opérer, ne pas avoir les mains dans les poches ; il est plus poli de dire simple, innocent, naïf que bête ; au lieu d’employer le verbe mentir on dit inventer ou déformer la vérité qui sont moins choquants. On préfère dire « une dame d’un certain âge » qu’ « une dame âgée ».

La grande époque de la pruderie linguistique était celle des Précieuses au 17e siècle qui faisaient la chasse aux termes « déshonnêtes ». L’interdiction s’étendait aux termes les plus divers. En voilà quelques exemples :

le balai – l’instrument de la propreté

la chemise – la campagne perpétuelle des morts et des

vivants

les dents – l’ameublement de la bouche

l’eau – l’élément liquide

être enrhumé – avoir un écoulement du nez

l’ongle – le plaisir innocent de la chair

les oreilles – les portes de l’entendement

le mariage – l’amour fini, l’abîme de la liberté

la nuit – la mère du silence

la guerre – la mère du désordre, etc.

Il est naturel que ces euphémismes sophistiqués furent de courte durée, car ils n’enrichissaient point le lexique du français.

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