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III. Les sources de nos connaissances sur le gallo-roman.

Tous les traités et chroniques du temps, la correspondance ecclésiastique

et celle des chancelleries royales, ainsi que l’enseignement se

font en latin médiéval appelé «bas latin», qui sont fortement teinté d’éléments

du langage parlé local, le gallo-roman.

Les textes juridiques

Ayant adopté la culture et la religion romaines, les Germains calquent

leur administration sur celle des vaincus et rédigent leurs lois en

latin. Les lois barbares (Leges Langobardorum, Lex salica, etc.) sont

rédigées en latin. Mais elles contiennent des fautes qui permettent de juger

du degré de leur écartement du latin classique et de déterminer les

tendances du développement du latin vulgaire évoluant en gallo-roman.

Les textes religieux

Les écrits théologiques, nombreux à cette époque, après une analyse

minutieuse fournissent des données précieuses révélant les voies du

développement de la langue.

Les chroniques du haut Moyen Age

Les écrits de l’évèque Grégoire de Tours (538 – 594), notamment sa

grande Histoire des Francs (Historia Francorum) (573, dix volumes en

latin), et ceux de Frédégaire (VIIe s.) abondent en incorrections: les genres

sont souvent confondus, les cas ne sont pas toujours respectés, le pronom

démonstratif de la 3 e personne assume la fonction du pronom personnel,

l’emploi de certains mots atteste des changements de sens, la graphie

témoigne de modifications phonétiques (ti est rendu par ci, ae par e), etc.

78

En réalité, ce ne sont pas des fautes, mais les premiers signes de la nouvelle

langue qui est en train de se former à la base du latin de l’époque.

Les glossaires

Le gallo-roman comporte tant de spécificités lexicales et grammaticales

qu’il apparaît à l’époques plusieurs glossaires avec les explications

(dites gloses) des formes et des mots vieillis du latin classique au moyen

des vocables romans. Les glossaires les plus importants sont ceux de

Cassel et de Reichenau, tous les deux datant du VIIIe s.

Les fautes d’orthographe

Si, dans les manuscrits, on trouve souvent des confusions régulières,

cela prouve qu’il ne s’agit pas d’une «faute», mais d’une tendance forte et

précise. Par ex., s’il y a une confusion régulière de ae et e, b et v, ci et ti,

cela témoigne que la prononciation de chaque son dans ces paires est la

même et que ces transformations se sont déjà achevées en gallo-roman.

IV. Le schéma récapitulatif de la préhistoire du français.

Or, la préhistoire du français se présente comme suit:

Questions ( * - questions demandant des réflexions)

I. Quelles sont les limites temporelles du gallo-roman?

1. Quand commence la crise de l’Empire romain? Comment se manifeste-

t-elle? Quelles en sont les causes?

Quel rôle ont joué les invasions des tribus germaniques dans l’écroulement

de l’Empire romain?

* Quelle tribu germanique a réussi à former un etat unifié et solide

sur le territoire de la France actuelle?

* D’où vient le nom de la France?

IIe – Iier ss. an av. n. ère le celtique

Ie s. av. n. ère –

IIe s. de n.ère

le celtique + le latin vulgaire

(bilinguisme)

Romanisation

IIe – Ve ss.

latin vulgaire

le roman commun

Ve – VIIIe ss.

le roman commun+le francique

(bilinguisme)

le gallo-roman

Germanisation

IXe s., 842 an l’ancien français

79

II. 1. * Est-ce que les Gallo-Romains ont été profondément touché

par la germanisation? Pourquoi?

Pourquoi les Francs ont-ils abandonné leur langue maternelle et

adopté le gallo-roman?

Est-ce que l’ancienne division linguistique de la Gaule subsiste?

Par quoi s’est-elle accentuée?

Comment est appelé l’idiome roman parlé au Nord de la Gaule?

Pourquoi?

Comment est appelé l’idiome roman parlé au Sud de la Gaule? Pourquoi?

2. Qu’appelle-t-on «la Renaissance carolingienne»?

Qu’est-ce que Charlemagne voulait faire renaître? Pourquoi?

III. * Est-ce que les linguistes disposent de larges sources sur le

gallo-roman? Quelles sont ces sources?

* Laquelle (lesquelles) de ces sources vous semble(nt) la (les) plus sûre(s)?

Quels sont les premiers documents écrits de la langue française?

IV. Combien de langues ont participé à la formation de la langue

française?

Est-ce que leurs apports ont été égaux?

Devoirs

1. Définissez: le roman commun, le gallo-roman, la germanisation,

le superstrat germanique, la Renaissance carolingienne.

2. Où retrouve-t-on les noms des anciennes tribus germaniques telles

que les Goths, les Ostrogoths, les Wisigoths, les Saxons, les Angles,

les Burgondes, les Francs, les Alamans, les Vandales, les Langobardes?

3. Trouvez sur la carte les régions de la langue d’oïl et de la langue d’oc.

Cours théorique 4

Le gallo-roman: Les changements phonetiques

L’objectif d’étude

Apprendre les particularités phonétiques du gallo-roman

L’apprenant doit savoir donner la définition des termes suivants:

un changement paradigmatique / syntagmatique, l’accent mélodique, l’accent

dynamique, une opposition phonologique, une position faible des con80

sonnes (initiale, finale, intervocalique), une position faible des voyelles (non

accentuée), une diphtongue, la diphtongaison spontanée / conditionnée (combinatoire),

la réduction (partielle, complète), la sonorisation / l’assourdissement,

un groupe vocalique / consonantique primaire / secondaire, un son

accessoire (d’appui), la palatalisation (la mouillure), une affriquée, la métathèse,

la prothèse, l’épenthèse, l’assimilation / la dissimilation

L’apprenant doit savoir

Les principaux changements paradigmatiques et syntagmatiques des

voyelles

Les principaux changements paradigmatiques et syntagmatiques des

consonnes

L’apprenant doit savoir faire

Analyser les mutations phonétiques du gallo-roman

Expliquer les causes des transformations phonétiques survenues en

gallo-roman

Analyser les aboutissements morphologiques des changements phonétiques

Etablir les relations structurales entre les changements tenant compte

de leur caractère systhématique

Déterminer les origines (celtiques, germaniques) des transformations

phonétiques

Le plan

I. Le développement de l’accentuation dynamique.

II. Les changements vocaliques.

1. Les changements paradigmatiques des voyelles.

2. Les changements syntagmatiques des voyelles.

III. Les changements consonantiques.

1. Les changements paradigmatiques des consonnes.

2. Les changements syntagmatiques des consonnes.

IV. L’évolution des voyelles et des consonnes depuis le latin

classique.

I. Le développement de l’accentuation dynamique.

Rappelons que l’accent mélodique du latin classique a été remplacé par

l’accent dynamique (tonique = de force = d’intensité) déjà en latin vulgaire.

Les Francs (peuple germanique) donnent au gallo-roman de nouvelles

tendances phonétiques en raison de leur accent nordique et de leur système

vocalique. Les habitudes articulatoires des Francs les portent à prononcer les

voyelles romanes beaucoup plus fortement que ne le font les populations

81

autochtones (les Gallo-Romains). Ainsi quelques nouvelles diphtongues se

sont formées dans le gallo-roman (la deuxième diphtongaison).

L’accent dynamique a influencé la structure phonétique du mot roman:

les syllabes non accentuées s’affaiblissent (réduction partielle) et peuvent,

plus tard, s’effacer complètement (réduction complète). Ainsi le volume

du mot vulgaire et gallo-roman diminue par rapport à celui du latin

classique – le mot devient plus court: asīnum (latin classique, 3 syllabes) >

âsne (ancien français, 2 syllabes) > âne (français moderne, 1 syllabe).

Le plus souvent la réduction complète se produit à la fin du mot (trait

du langage parlé) et concerne avant tout les mots-outils: quomodo > comme

. Ainsi, le chagement du type d’accent a-t-il contribué, via la réduction

des voyelles finales (=flexionnelles), à maintenir la tendance à la réduction

des cas en effaçant les distinctions flexionnelles entre les formes casuelles

du mot latin. Ce fait confirme la thèse que la langue est un système: un

changement d’ordre phonétique entraîne un autre d’ordre morphologique.

II. Les changements vocaliques.

1. Les changements paradigmatiques des voyelles.

Quant aux voyelles, leur développement dépend de leur accentuation,

du type de syllabe et de leur place dans le mot. Le voisinage consonantique

et vocalique est aussi important.

Les principaux changements paradigmatiques des voyelles sont les

suivants:

– l’achèvement de la constitution de la nouvelle opposition phonologique

qualitative «voyelle ouverte / voyelle fermée»;

– la formation des nouvelles diphtongues spontanées: la «deuxième

» diphtongaison;

– la formation des diphtongues dites conditionnées;

– le déplacement de l’articulation en avant;

– le développement de la nasalisation.

L’achèvement de la constitution de la nouvelle opposition

phonologique qualitative «voyelle ouverte / voyelle fermée»

Rappelons que dans le système vocalique du latin vulgaire l’opposition

qualitative des voyelles («voyelle ouverte / voyelle fermée») succède

à l’opposition quantitative («voyelle brève / voyelle longue») du latin

classique. En gallo-roman dans leur ensemble les voyelles longues deviennent

fermées, les voyelles brèves deviennent ouvertes et depuis ce

temps-là les voyelles s’opposent définitivement par cette nouvelle caractéristique

différentielle «ouverture / fermeture». Ainsi, s’est-il créé une

nouvelle opposition phonologique d’ordre qualitative «ouverture / fermeture

» qui a remplacé l’ancienne opposition phonologique latine d’ordre

quantitative «brièveté / longueur».

82

La formation des nouvelles diphtongues spontanées: la

«deuxième» diphtongaison

Rappelons qu’en latin vulgaire les diphtongues dites spontanées se sont

déjà formées à partir de deux voyelles libres accentuées ouvertes ę et :

ę [ > ęę > eę > ié : cathédra > chare

[ > o¸ o¸> o o¸ > uó > ué : óve > nf > nuef

En gallo-roman il s’est produit la deuxième diphtongaison (VIe –

VIIIe ss.) qui touche les mêmes voyelles mais fermées qui ont passé respectivement

aux diphtongues éi ( > oi ) et óu ( > eu):

[ >ee > ei > éi > oi : mé > méi > moi

[ >oo > ou > óu > eu : flóres > flóurs > fleur

La formation des diphtongues dites conditionnées

Au VIIe s. apparaissent plusieurs diphtongues dites conditionnées

(ou combinatoires).

La formation des diphtongues conditionnées (ou combinatoires) est

due à l’influence des sons voisins. Les voyelles les plus fermées ī et ū ne

sont pas atteintes par la diphtongaison: lībra > livre, mūrum > mur.

Quatre sources ont fourni au français des diphtongues conditionnées:

A. La palatalisation de k et g en position intervocalique devant a, et aussi

en position devant une autre consonne: plaga > plaje > plaie, lactu > lait.

B. La palatalisation de k et g devant e. A la suite de cette mutation

se dégage un j: cáru > chiér, manducáre > manugare > mandgiér.

C. Les consonnes nasales n et m transforment les voyelles précèdentes

en diphtongues conditionnées nasalisées:

N. B. Les diphtongues ne se forment pas dans une syllabe fermée:

dente > d nt, lentu > l nt.

D. La vocalisation de l en u devant une consonne, suivie de la fusion

de u avec une voyelle précédente:

l + consonne > u + consonne : alba > aube, calidu > chaud.

Les causes de la diphtongaison restent inconnues. Il existe plusieurs

théories à ce sujet. Ainsi, G. Ascoli l’attribue à l’influence du substrat

celtique. Selon certains romanistes (tels И. М. Тронский, P. Verrier) la

diphtongaison aurait été causée par des faits de l’accentuation latine. Les

structuralistes (tels A. G. Haudricourt et A. G. Juilland et d’autres) recherchent

les causes de la diphtongaison dans les facteurs internes du

Combinaisons de sons Diphtongues nasalisées Exemples

a + n, m ãn, ãm manum > mãn; pane > pãn

e + n, m ien, iem venit > vient

83

développement du phonétisme français. Ces savants estiment que dans

les deux nouvelles séries des voyelles gallo-romanes ęe et o¸o les voyelles

auraient été très peu différenciées et la langue aurait réagi par une diphtongaison

pour éviter la confusion possible des phonèmes.

W. von Wartburg, H. Brinkmann, Th. Frigs, A. Dauzat expliquent la

diphtongaison française par l’influence immédiate des parlers germaniques (surtout

francs). Selon eux c’est le très fort accent tonique des parlers francs qui

aurait provoqué l’allongement et puis la diphtogaison des voyelles. Pourtant,

on ne saurait nier que les premiers exemples de la diphtongaison datent de bien

avant l’invasion franque, comme le démontre, par exemple, G. Straka.

Le déplacement de l’articulation en avant

En gallo-roman cette transformation a touché deux voyelles – ū et a.

Tonique ou atone, libre ou entravé, ū passe en [y]: nūdu > nu, jūrare

> jurer (la mouillure).

L’origine et la chronologie de cette altération sont très discutées, sans

aboutir à une solution unique. A.Dauzat et M.Cohen l’attribuent à l’influence

germanique, d’autres linguistes y trouvent les effets de l’influence

celtique. Les structuralistes (H.Lübke, A.G.Haudricourt, A.G.Juillard) supposent

que le passage ū > y est un processus qui se produit conformément

aux lois propres à la langue française (développement spontané).

Le développement de la voyelle a est conditionné par le caractère de

la syllabe: dans une syllabe ouverte a tonique (accentuée) passe à e, c’està-

dire, son articulation se déplace en avant de la cavité buccale: fràtre >

frère, etc. Dans une syllabe fermée a reste sans changements: arbore >

arbre. Il faut aussi tenir compte de l’entourage consonantique: devant

une nasale a > ai (diphtongaison conditionnée): manu > main; après une

palatale a > ie: caput > chief AF > chef FM.

L’évolution de à[ > e est un des principaux critères pour différencier

le français du provençal où a subsiste sans changement: chanter,

porter (français)  kanta, portar (provençal).

Le développement de la nasalisation

C’est surtout en ancien français que les voyelles commenceront à se

nasaliser avec intensité devant n et m. Mais les débuts de ce phénomène

remontent à l’époque du gallo-roman et même plus tôt – en latin vulgaire,

où les voyelles a et e commencent à se prononcer avec une légère nuance

nasale: tantu > tãnt, plena > plěin.

2. Les changements syntagmatiques des voyelles.

La réduction partielle ou complète dans les positions faibles se poursuit

toujours: càlida > calda, dorm(i)tórium, nullum > nul, mittere > mettre.

Les conséquences de cette réduction pour le phonétisme du français

naissant sont importantes: il s’agit du racourcissement progressif du mot,

84

et pour la morphologie, car elle contribue à la déchéance des flexions,

donc, du système casuelle.

III. Les changements consonantiques.

Quant aux consonnes, leur développement dépend avant tout de leur

position dans le mot; le voisinage des consonnes et des voyelles est aussi

important (voir les positions fortes et faibles des consonnes).

1. Les changements paradigmatiques des consonnes.

Les changements paradigmatiques les plus importants sont les suivants:

– le développement de la palatalisation – la formation des affriquées;

– la formation des consonnes interdentales;

– l’apparition des nouvelles consonnes d’origine germanique w et h.

Le développement de la palatalisation – la formation des

affriquées

La palatalisation (mouillure des consonnes) est la principale modification

de l’évolution des consonnes parce qu’elle a abouti à la formation

des nouveaux phonèmes appelés affriqués.

Les affriquées sont des consonnes complexes. Des quatre affriquées

gallo-romanes deux sont sonores [dz, dj] et deux sont sourdes [ts, tƒ].

Il est à noter que la palatalisation se développe depuis le latin parlé

(IIe –Ve ss.) et s’accentue en gallo-roman (Ve – VIIIe ss.).

Palatalisation (mouillure) Formation des affriquées (vers VIII s.)

k+i, e > k' [ts]

centum [k’entu] cent [tsent]

k+a > k’ []

Karolus [k’arolus] Charles [tƒarle]

g+e, i, a > g’ [dj]

gardinu [g'ardin] jardin [djardin]

argilla [arg' illa] argille [ardjile]

d+e [dz]

(duo)decim douze [d(o)udze]

d+i, b+i, n+i [dj]

rabia [rab’a] rage [radje]

somnium [somn'iym] songe [sondje]

p+i []

hapia [hap’ ia] hache [hatƒe]

l+i, e [l’]

filia [fil’ ia] fille [fil’e]

n+i, e [n’]

vinea [vin’ ia] vigne [vin’e]

85

L’orthographe n’a pas toujours suivi le changement de la prononciation:

les lettres latines g et c qui en latin classique marquent respectivement

les sons [g] et [k], en gallo-roman servent à marquer les sons

affriqués [dj] et [ts]. Mais parfois l’écriture tâche de rendre plus fidèlement

la prononciation: Karolus [k’arolus] > Charles [arle].

Les causes de la palatalisation ne sont pas claires. Certains savants

cherchent à expliquer la palatalisation par l’influence celtique (Ph. A. Becker),

d’autres, par l’influence germanique (F. Diez, A. Dauzat). Les recherches

faites par K. Ringenson lui ont permis de venir à la conclusion que la

palatalisation serait propre à la langue française de toutes les époques se

produisant sans aucune influence du substrat germanique. A. G. Haudricourt

et A. G. Juilland donnent une explication structurale de la palatalisation, en

se basant uniquement sur des faits internes du développement linguistique.

La formation des consonnes interdentales

Il s’est formé en gallo-roman deux consonnes interdentales (à la suite

de l’affaiblissement des consonnes d, t, dans les positions fables – intervocalique

et finale) đ et θ: vita > vida > viđa > via; amat[amat] > amet [ameθ].

L’apparition des nouvelles consonnes d’origine germanique h et w

Le système phonologique du gallo-roman s’enrichit à l’époque de

deux consonnes d’origine germanique: h et w.

Rappelons que le h latin a disparu depuis le IIe s. de n. ère: homo > omo.

Un autre h, du superstrat germanique, est adopté dans la prononciation

des Gallo-Romains vers le Ve s.: hanka > hanche.

La pronociation du h germanique comme un souffle a survécu jusqu’aux

XVe – XVIe ss. et subsiste encore de nos jours dans les dialectes

de l’est et du Midi. En français littéraire il n’en reste que l’interdiction de

la liaison devant le h aspiré.

Le w germanique ne se rencontre qu’en position forte à l’initiale du

mot: *werre > guerre, Wilihelm > Guillelme > Guillaume, *want > gant.

2. Les changements syntagmatiques des consonnes.

Parmi les changements syntagmatiques les plus importants sont:

– la réduction et la chute des consonnes dans les positions faibles;

– l’introduction des consonnes accessoires (dites d’appui);

– l’assimilation / la dissimilation;

– la métathèse.

La réduction et la chute des consonnes dans les positions faibles

La réduction (partielle ou complète) se produit dans les positions

faibles: intervocalique (A), devant une autre consonne (B), à la fin du

mot (C). Rappelons qu’en position forte les consonnes subsistent, à quelques

rares exceptions.

86

A. Dans la position intervocalique les consonnes sourdes deviennent

sonores (réduction partielle):

Très souvent le processus ne s’arrête pas là et les consonnes intervocaliques

deviennent sujets à la réduction complète: focum > fuou >

feu, habeo >*aio >ai.

B. Dans le groupe consonantique. Cette réduction concerne avant tout

les consonnes doubles identiques (géminées): vellit > velit. Dans le groupe

de deux consonnes la réduction se fait au détriment de la première consonne:

mensa > mesa. Dans le groupe de trois consonnes la réduction se

fait au détriment de la consonne médiane: comp(u)tare > com ter, dormitorium

>*dormtorui >dor toir.

Avant de disparaître les consonnes subissent une réduction partielle (en

forme de sonorisation ou d’assourdissement, par ex.): *eclesia > église.

Cette simplification des groupes consonantiques représente la tendance

essentielle de l’époque: septem > sete > set ( > sept reconstitué

plus tard par les grammairiens).

L’aboutissement de la consonne en une voyelle n’est pas rare à l’époque

et est appelé la vocalisation: fructu > fruit, nocte > nuit.

La réduction des groupes consonantiques représente l’une des tendances

phonétiques les plus stables dans l’histoire du français et joue un

rôle considérable dans la constitution de la syllabe type du français, la

syllabe ouverte. La tendance à la syllabe ouverte se manifeste donc depuis

le latin vulgaire et atteint son comble vers l’époque de la stabilisation

du français en tant que langue nationale (XVIe s.).

C. A la fin de mots les consonnes:

– se réduisent partiellement (en particulier s’assourdissent, s’il s’agit

d’une consonne sonore);

– se réduisent complètement: septem > septe .

Les consonnes sonores à la fin des mots deviennent sourdes: largu

> larc, grande > grant; et même disparaissent: clave > clef > clé (assourdissement

> disparition de la consonne finale assourdie).

L’introduction des consonnes accessoires (dites d’appui)

Le plus souvent elles sont épenthétiques et apparaissent dans les

groupes consonantiques secondaires (ceux qui se sont formés à la suite

des réductions vocaliques) pour faciliter la prononciation:

p > b ripa > riba

t > d vita > vida

s > z rosa > rose

87

L’assimilation / la dissimilation

Ces processus débutés en latin vulgaire se poursuivent.

La dissimilation est un processus qui de deux phonèmes identiques,

se trouvant même à distance fait deux sons différents: terebra non telebra.

L’assimilation: cognosco > *connosco > conosco ( > connaître),

hominem > homne > homme. L’assimilation partielle (qui ne s’est pas

encore acheveé) est l’assourdissement d’une consonne: plebs non pleps.

La métathèse

La métathèse, le déplacement des sons ou même des syllabes: scintilla

> stincilla > étincelle, cupreum > cuivre.

IV. L’évolution des voyelles et des consonnes depuis le latin

classique.

L’évolution des voyelles depuis le latin classique

L’évolution des consonnes depuis le latin classique

Questions ( * - questions demandant des réflexions)

I. 1. Quel est le type d’accentuation gallo-roman?

L’influence du superstrat germanique, a-t-elle renforcé ou affaibli

l’accentuation dynamique du latin vulgaire?

Quels sont les aboutissements morphologiques de l’accentuation

dynamique?

II. 1. Quels sont les principaux changements paradigmatiques des

voyelles?

Quelle est la nouvelle opposition phonologique qui s’est constituée

dans le vocalisme du gallo-roman?

Consonne

épenthétique

Combinaisons

de consonnes Exemples

t sr > str *ess(e)re > estre (> être)

b mr > mbr cam(e)ra > chambre

d lr > ldr *vol(e)raio > voldrai ( > voudrai)

LCl: ă ā ě ē ī o ō й ū ae oe au

\/ | \/ | | \ / | | | |

GR: a ę e i o¸ o u ę e o

LCl: p t k b d g f s l r m n h

| /\ / | \ | / | \ /\ | /\ /\ | | /\ | \

GR: p t k tƒ ts b d dz đ g dj f s z l l’ r m n n’ 􀀀h w

88

Les voyelles longues latines, en quelles voyelles «gallo-romanes» se

sont-elles transformées?

Les voyelles brèves latines, en quelles voyelles «gallo-romanes» se

sont-elles transformées?

Quelles sont les voyelles touchées par la deuxième diphtongaison?

* Quelles sont les conditions nécessaires et obligatoires pour que la

diphtongaison spontanée ait lieu?

Dans quelles conditions se produit la diphtongaison conditionnée

(combinatoire)?

* Par quoi la deuxième diphtongaison diffère-t-elle de la première?

* Qu’ont-elles de commun?

A quoi les linguistes attribuent-ils la diphtongaison?

Quelles sont les voyelles dont l’articulation s’est déplacée en avant?

Quel est le nouveau phonème qui s’est formé à la suite de la mouillure

du u latin?

* A quoi serait dû ce déplacement?

* Est-ce que le déplacement en avant de a s’est produit sur tout le

territoire gallo-roman? *Pourquoi?

2. Quels sont les principaux changements syntagmatiques des voyelles?

Quels sont les aboutissements morphologiques de la réduction des

voyelles à la fin du mot?

III. 1. Quels sont les principaux changements paradigmatiques des

consonnes?

A quoi les linguistes attribuent-ils la palatalisation?

Quelles sont les nouvelles consonnes qui ont apparu à la suite de la

palatalisation?

* Le français moderne possède-t-il des consonnes affriquées? Quelles

langues romanes en possèdent?

Les consonnes interdentales se sont-elles conservées jusqu’à nos

jours? * Pourquoi?

Le gallo-roman, a-t-il emprunté des consonnes «étrangères»? Quelles

sont ces consonnes? Se sont-elles gardées jusqu’à nos jours?

* Comment peut-on deviner l’origine germanique de certains mots

en français moderne?

2. Quels sont les principaux changements syntagmatiques des consonnes?

* Quels sont les aboutissements morphologiques de la réduction des

consonnes finales?

89

IV. Le système vocalique du gallo-roman s’est-il enrichi ou appauvri

par rapport à celui du latin classique?

Le système consonantique du gallo-roman s’est-il enrichi ou appauvri

par rapport à celui du latin classique?

* Quels sont les changements phonétiques qui seraient attribués au

substrat celtique?

* Quels sont les changements phonétiques qui seraient dus au superstrat

germanique?

Quels sont les sons qui n’existent plus en français moderne?

Devoirs

1. Définissez: un changement paradigmatique / syntagmatique, l’accent

mélodique, l’accent dynamique, une opposition phonologique, une

position faible des consonnes (initiale, finale, intervocalique), une position

faible des voyelles (non accentuée), une diphtongue, la diphtongaison

spontanée / conditionnée (combinatoire), la réduction (partielle, complète),

la sonorisation / l’assourdissement, un groupe vocalique / consonantique

primaire / secondaire, un son accessoire (d’appui), la palatalisation

(la mouillure), une affriquée, la métathèse, la prothèse, l’épenthèse,

l’assimilation / la dissimilation.

2. Nommez les mutations phonétiques qui sont caractéristiques seulement

au gallo-roman et celles qui représentent l’évolution des transformations

débutées en latin vulgaire; celles qui se sont achevées en galloroman

et celles qui vont encore évoluer.

3. Précisez les origines (latines, celtiques, germaniques) des changements

survenus ou se déroulant à cette époque.

4. Expliquez la différence entre une diphtongue spontanée et une

diphtongue conditionnée (voir II. 1.).

5. Décrivez le processus de la formation des diphtongues.

e [ >ee > ei > éi :

o [ >oo > ou > óu :

Expliquez quelles sont les mutations phonétiques qui y ont eu lieu.

(voir II. 1.).

6. Etudiez l’exemple suivant et dites quelle est cette transformation:

parlàre > parler, parlàtis > parlez, parlàtu > parlé, parlàrunt > parlèrent

(voir II. 1.).

7. Etudiez les mots suivants et nommez les processus phonétiques

qui y ont eu lieu.

90

Dans quelles positions ont eu lieu ces transformations – fortes ou

faibles? Précisez chaque fois ces positions (accentuée, non accentuée,

initiale, finale, intervocalique, devant une consonne, etc.)

8. Dans chacun des mots ci-dessous il s’est produit deux ou trois

mutations. Trouvez-les et expliquez-les:

figulus > figel

lanius > laneo

botruus > butro

obstetrix > opsetris

capitulum > capiclum

caballum > cheval

9. Expliquez les transformations suivantes

ripa > riba > riue [riwe] > rive [ riv]

pacare > pagare > pajar [pag ar] > payer

10. Etudiez la mutaion de la consonne intervocalique t. Son évolution

passe par plusieurs étapes:

– la consonne sourde passe à la consonne sonore (au IVe s.) t >

d: vita > vida;

Processus Exemples

1 Réduction des voyelles non accentuées A

Theophilus > Izophilus

brattea > brattia

lancea > lancia

balteus > baltius

linteum > lintium

2 Nasalisation B formica > furmica

3 Assimilation C

musivum > museum

avus > aus

favilla > failla

pavor > paor

4 Fermeture des voyelles longues D scintilla > stincilla

5 Métathèse E pancarpus > parcarpus

Réduction complète des consonnes

intervocalques digitus > dicitus

plebs > pleps

6 Réduction partielle des consonnes

intervocalques F bravium > brabium

debere > deveir

Réduction des groupes consonantiques G

calida > calda

orbis > orbs

stabulum > stablum

tribula > tribla

7 Réduction partielle (assourdissement) H occasio > occansio

8 Sons accessoires I terebra > telebra

9 Palatalisation J auctoritas > autoritas

10 Dissimilation K frustum > frustrum

91

– la consonne sonore d passe à la consonne interdentale (au VIIIe s.)

d >đ: vida > viđa;

– l’interdentale đ disparaît à la fin du XI e s.: viđa > via.

Les processus linguistiques sont-ils lents? Combien de siècles (périodes)

a duré cette évolution?

11. De quelle origine sont les mots suivants: hache, haïr, heurter,

hareng? Quel élément phonétique aide à déterminer l’origine des ces

mots? (voir III. 1.).

Cours théorique 5

Le gallo-roman: Les changements grammaticaux

L’objectif d’étude

Apprendre les particularités grammaticales du gallo-roman

L’apprenant doit savoir donner la définition des termes suivants:

un changement paradigmatique / syntagmatique, un cas, une forme casuelle

( = flective), l’analytisme (forme analytique), le synthétisme (forme

synthétique), l’analogie, l’étymologie, une déclinaison, une conjugaison,

un groupe de mots, une proposition simple, une proposition complexe

(= une phrase), une proposition juxaposée, coordonnée, subordonnée

L’apprenant doit savoir

Les modifications survenues dans le nom, l’adjectif, les pronoms, le verbe

Les tendances se développant dans le système morphologique du

gallo-roman

Les traits particuliers et principales tendances syntaxiques du gallo-

roman

L’apprenant doit savoir faire

Analyser les mutations grammaticales survenues en gallo-roman

Trouver les faits d’ordre phonétique entraînant des transformations

morphologiques

Expliquer les causes des transformations grammaticales survenues

en gallo-roman

Etablir les relations structurales entre les changements tenant compte

que la langue est un système

Déterminer les origines (celtiques, germaniques) des changements

grammaticaux

92

Plan

I. Les changements morphologiques survenus en gallo-roman.

1. Le nom.

2. L’adjectif.

3. Les pronoms.

4. Le verbe.

5. L’adverbe.

II. Les particularités de la syntaxe du gallo-roman.

I. Les changements morphologiques survenus

en gallo-roman.

La tendance essentielle de l’évolution du système grammatical du

gallo-roman est l’emploi de plus en plus large des formes analytiques au

détriment des formes synthétiques: la flexion disparaît graduellement et

les relations syntaxiques entre les mots dans la phrase s’expriment à l'aide

des outils plus souvent qu’en latin classique.

1. Le nom.

Le substantif en gallo-roman possède les même catégories grammaticales

qu’en latin classique: les catégories du genre, du nombre et du cas. Le

système grammatical du nom a subi d’importantes modifications mais elles

s’inscrivent dans le cadre de la tendance principale de l’évolution du français:

la transformation du synthétisme latin en analytisme français.

Le principal changement paradigmatique en gallo-roman est la

dégradation du système casuel latin qui se présente sous deux aspects:

– réduction des types de déclinaison;

– réduction du nombre des cas.

On atteste aussi une forte tendance à l’analogie.

La dégradation du système casuel

La réduction des types de déclinaison

Les cinq déclinaisons du nom en latin classique sont reduites à trois

en gallo-roman.

La réduction du nombre des cas

Le nombre de cas en gallo-roman se réduit à deux (à la différence

du latin classique qui en possédait six).

Ainsi, vers les VIIe – VIIIe ss. le système casuel du gallo-roman

comprend trois types de déclinaison:

93

L e p r e m i e r type de déclinaison

Substantifs du féminin en -a

(en voie de disparition)

Au pluriel de la première déclinaison la flexion primitive -ae cède

place à la flexion -as par analogie avec Acc pl.: terrae Nom. pl. > terras

Nom. pl.

Il serait possible que le maintien du -s final dans les langues romanes

dites occidentales – la marque de pluriel – soit dû au substrat celtique.

L e d e u x i è m e type de déclinaison

Substantifs du masculin en -us, -er

(déclinaison dite «croisée»)

L e t r o i s i è m e type de déclinaison

(en voie de disparition)

Substantifs du féminin et du masculin

Parisyllabiques (парносложные)

Imparisyllabiques (непарносложные)

* parfois ces formes ont été refaites par analogie avec anni (II type

de déclinaison).

Une forte tendance à l’analogie

Elle s’accentue et reconstruit le système casuel afin de le rendre

plus homogène, unifié, simple, régulier.

Singulier Pluriel

Nom. terra folia terrae (-as) foliae (-as)

Acc. terra(m) folia(m) terras folias

Singulier Pluriel

Nom. ann(u)s ann(i)

Acc. ann(u)(m) ann(o)s

Singulier Pluriel

Nom. pater patr(e)s (*patri)

Acc. patr(e)(m) patr(e)s

Singulier Pluriel

Nom. com(e)s comit(e)s (*comiti)

Acc. comit(e)(m) comit(e)s

94

A.

L e p r e m i e r type de déclinaison

Les féminins en -a

Grâce à l’unification des flexions au pluriel les noms féminins en

gallo-roman ont perdu la catégorie du cas depuis très tôt.

B. Le troisième type, imparisyllabiques. Ces noms ont deux types

de radicaux qui s’opposent – le radical du Nom. sing. et celui de l’Accusatif.

La force d’analogie les régularise. Ainsi :

Grâce à l’unification des radicaux les féminins du III type ne se

déclinent plus dès le gallo-roman.

Le principal changement syntagmatique est l’emploi de plus en plus

large des prépositions.

Ainsi, la réduction des formes casuelles est équilibrée par des constructions

prépositionnelles: fratris liber > liber de fratre.

Le plus souvent la valeur du Génétif est rendue à l’aide de la préposition

de, celle du Datif à l’aide de la préposition ad, celle de l’Ablatif à

l’aide des prépositions de, ab, ex: occidam lancea > occidam de lancea,

ait mihi > ait ad me, dicens ei > dicens ad eum, etc.