- •2. Les sciences linguistiques historiques.
- •2. La langue et la parole.
- •2. La synchronie et la diachronie.
- •Il existe deux approches pour effectuer l’analyse diachronique:
- •II. Les particularités morphologique de la langue française.
- •Ignorée des Celtes. La défaite des Gaulois s’explique en plus par une absence
- •III. La crise de l’Empire romain (iIe –Ve ss. De n. Ère).
- •IV. Les sources de nos connaissances sur latin vulagire.
- •1903) A rassemblé dans le Corpus inscriptionum latinarum en 16 volumes
- •Isula lv, etc.
- •Vulgaire tend à refaire ce système et le rendre plus simple, homogène,
- •II. Les particularités de la syntaxe du latin vulgaire.
- •Venit amicus ? lv. Le nombre de tours et de mots interrogatifs diminue.
- •Vulgaire n’en avaient pas besoin vu le déclin des arts et des sciences à l’époque.
- •Il a apparu un nouveau suffixe -iscus.
- •813 Prescrit aux prêtres de traduire «leurs homélies latines» et de prêcher
- •III. Les sources de nos connaissances sur le gallo-roman.
- •2. L’adjectif.
- •3. Les pronoms.
- •4. Le verbe.
- •5. L’adverbe.
- •Infinitivo» et «Nominativus cum infinitivo» sont oubliées, tombées en
- •Indépendant.
- •2. Les invasions des Normands et leurs conséquences linguisques.
- •XVe s., une présence constante de la culture française et de la langue qui
- •3. Les Croisades.
- •XiIe ss.) l’idéal change, la chanson de geste s’adoucit. C’est le temps des
- •Vivant comme des humains. Marie de France compose en anglo-normand
- •4. L’influence des changements phonétiques sur l’évolution des
- •2. La formation de (des) l’mots nouveaux.
- •Interne)
- •2. La guerre de Cent Ans (1337 – 1453).
- •1Er groupe est devenu homogène, parce que constitué d’un seul type
- •2. Les changements syntagmatiques des consonnes.
- •III. Le changement du type de l’accentuation. La liaison.
- •Il s’est avéré qu’une valeur grammaticale (par ex., celle du sujet)
- •Vu l’amuïssement du -t final à partir du xiIe s., les formes de la 1ière
- •Isbn 978-985-515-328-4
III. Les sources de nos connaissances sur le gallo-roman.
Tous les traités et chroniques du temps, la correspondance ecclésiastique
et celle des chancelleries royales, ainsi que l’enseignement se
font en latin médiéval appelé «bas latin», qui sont fortement teinté d’éléments
du langage parlé local, le gallo-roman.
Les textes juridiques
Ayant adopté la culture et la religion romaines, les Germains calquent
leur administration sur celle des vaincus et rédigent leurs lois en
latin. Les lois barbares (Leges Langobardorum, Lex salica, etc.) sont
rédigées en latin. Mais elles contiennent des fautes qui permettent de juger
du degré de leur écartement du latin classique et de déterminer les
tendances du développement du latin vulgaire évoluant en gallo-roman.
Les textes religieux
Les écrits théologiques, nombreux à cette époque, après une analyse
minutieuse fournissent des données précieuses révélant les voies du
développement de la langue.
Les chroniques du haut Moyen Age
Les écrits de l’évèque Grégoire de Tours (538 – 594), notamment sa
grande Histoire des Francs (Historia Francorum) (573, dix volumes en
latin), et ceux de Frédégaire (VIIe s.) abondent en incorrections: les genres
sont souvent confondus, les cas ne sont pas toujours respectés, le pronom
démonstratif de la 3 e personne assume la fonction du pronom personnel,
l’emploi de certains mots atteste des changements de sens, la graphie
témoigne de modifications phonétiques (ti est rendu par ci, ae par e), etc.
78
En réalité, ce ne sont pas des fautes, mais les premiers signes de la nouvelle
langue qui est en train de se former à la base du latin de l’époque.
Les glossaires
Le gallo-roman comporte tant de spécificités lexicales et grammaticales
qu’il apparaît à l’époques plusieurs glossaires avec les explications
(dites gloses) des formes et des mots vieillis du latin classique au moyen
des vocables romans. Les glossaires les plus importants sont ceux de
Cassel et de Reichenau, tous les deux datant du VIIIe s.
Les fautes d’orthographe
Si, dans les manuscrits, on trouve souvent des confusions régulières,
cela prouve qu’il ne s’agit pas d’une «faute», mais d’une tendance forte et
précise. Par ex., s’il y a une confusion régulière de ae et e, b et v, ci et ti,
cela témoigne que la prononciation de chaque son dans ces paires est la
même et que ces transformations se sont déjà achevées en gallo-roman.
IV. Le schéma récapitulatif de la préhistoire du français.
Or, la préhistoire du français se présente comme suit:
Questions ( * - questions demandant des réflexions)
I. Quelles sont les limites temporelles du gallo-roman?
1. Quand commence la crise de l’Empire romain? Comment se manifeste-
t-elle? Quelles en sont les causes?
Quel rôle ont joué les invasions des tribus germaniques dans l’écroulement
de l’Empire romain?
* Quelle tribu germanique a réussi à former un etat unifié et solide
sur le territoire de la France actuelle?
* D’où vient le nom de la France?
IIe – Iier ss. an av. n. ère le celtique
Ie s. av. n. ère –
IIe s. de n.ère
le celtique + le latin vulgaire
(bilinguisme)
Romanisation
IIe – Ve ss.
latin vulgaire
le roman commun
Ve – VIIIe ss.
le roman commun+le francique
(bilinguisme)
le gallo-roman
Germanisation
IXe s., 842 an l’ancien français
79
II. 1. * Est-ce que les Gallo-Romains ont été profondément touché
par la germanisation? Pourquoi?
Pourquoi les Francs ont-ils abandonné leur langue maternelle et
adopté le gallo-roman?
Est-ce que l’ancienne division linguistique de la Gaule subsiste?
Par quoi s’est-elle accentuée?
Comment est appelé l’idiome roman parlé au Nord de la Gaule?
Pourquoi?
Comment est appelé l’idiome roman parlé au Sud de la Gaule? Pourquoi?
2. Qu’appelle-t-on «la Renaissance carolingienne»?
Qu’est-ce que Charlemagne voulait faire renaître? Pourquoi?
III. * Est-ce que les linguistes disposent de larges sources sur le
gallo-roman? Quelles sont ces sources?
* Laquelle (lesquelles) de ces sources vous semble(nt) la (les) plus sûre(s)?
Quels sont les premiers documents écrits de la langue française?
IV. Combien de langues ont participé à la formation de la langue
française?
Est-ce que leurs apports ont été égaux?
Devoirs
1. Définissez: le roman commun, le gallo-roman, la germanisation,
le superstrat germanique, la Renaissance carolingienne.
2. Où retrouve-t-on les noms des anciennes tribus germaniques telles
que les Goths, les Ostrogoths, les Wisigoths, les Saxons, les Angles,
les Burgondes, les Francs, les Alamans, les Vandales, les Langobardes?
3. Trouvez sur la carte les régions de la langue d’oïl et de la langue d’oc.
Cours théorique 4
Le gallo-roman: Les changements phonetiques
L’objectif d’étude
Apprendre les particularités phonétiques du gallo-roman
L’apprenant doit savoir donner la définition des termes suivants:
un changement paradigmatique / syntagmatique, l’accent mélodique, l’accent
dynamique, une opposition phonologique, une position faible des con80
sonnes (initiale, finale, intervocalique), une position faible des voyelles (non
accentuée), une diphtongue, la diphtongaison spontanée / conditionnée (combinatoire),
la réduction (partielle, complète), la sonorisation / l’assourdissement,
un groupe vocalique / consonantique primaire / secondaire, un son
accessoire (d’appui), la palatalisation (la mouillure), une affriquée, la métathèse,
la prothèse, l’épenthèse, l’assimilation / la dissimilation
L’apprenant doit savoir
Les principaux changements paradigmatiques et syntagmatiques des
voyelles
Les principaux changements paradigmatiques et syntagmatiques des
consonnes
L’apprenant doit savoir faire
Analyser les mutations phonétiques du gallo-roman
Expliquer les causes des transformations phonétiques survenues en
gallo-roman
Analyser les aboutissements morphologiques des changements phonétiques
Etablir les relations structurales entre les changements tenant compte
de leur caractère systhématique
Déterminer les origines (celtiques, germaniques) des transformations
phonétiques
Le plan
I. Le développement de l’accentuation dynamique.
II. Les changements vocaliques.
1. Les changements paradigmatiques des voyelles.
2. Les changements syntagmatiques des voyelles.
III. Les changements consonantiques.
1. Les changements paradigmatiques des consonnes.
2. Les changements syntagmatiques des consonnes.
IV. L’évolution des voyelles et des consonnes depuis le latin
classique.
I. Le développement de l’accentuation dynamique.
Rappelons que l’accent mélodique du latin classique a été remplacé par
l’accent dynamique (tonique = de force = d’intensité) déjà en latin vulgaire.
Les Francs (peuple germanique) donnent au gallo-roman de nouvelles
tendances phonétiques en raison de leur accent nordique et de leur système
vocalique. Les habitudes articulatoires des Francs les portent à prononcer les
voyelles romanes beaucoup plus fortement que ne le font les populations
81
autochtones (les Gallo-Romains). Ainsi quelques nouvelles diphtongues se
sont formées dans le gallo-roman (la deuxième diphtongaison).
L’accent dynamique a influencé la structure phonétique du mot roman:
les syllabes non accentuées s’affaiblissent (réduction partielle) et peuvent,
plus tard, s’effacer complètement (réduction complète). Ainsi le volume
du mot vulgaire et gallo-roman diminue par rapport à celui du latin
classique – le mot devient plus court: asīnum (latin classique, 3 syllabes) >
âsne (ancien français, 2 syllabes) > âne (français moderne, 1 syllabe).
Le plus souvent la réduction complète se produit à la fin du mot (trait
du langage parlé) et concerne avant tout les mots-outils: quomodo > comme
. Ainsi, le chagement du type d’accent a-t-il contribué, via la réduction
des voyelles finales (=flexionnelles), à maintenir la tendance à la réduction
des cas en effaçant les distinctions flexionnelles entre les formes casuelles
du mot latin. Ce fait confirme la thèse que la langue est un système: un
changement d’ordre phonétique entraîne un autre d’ordre morphologique.
II. Les changements vocaliques.
1. Les changements paradigmatiques des voyelles.
Quant aux voyelles, leur développement dépend de leur accentuation,
du type de syllabe et de leur place dans le mot. Le voisinage consonantique
et vocalique est aussi important.
Les principaux changements paradigmatiques des voyelles sont les
suivants:
– l’achèvement de la constitution de la nouvelle opposition phonologique
qualitative «voyelle ouverte / voyelle fermée»;
– la formation des nouvelles diphtongues spontanées: la «deuxième
» diphtongaison;
– la formation des diphtongues dites conditionnées;
– le déplacement de l’articulation en avant;
– le développement de la nasalisation.
L’achèvement de la constitution de la nouvelle opposition
phonologique qualitative «voyelle ouverte / voyelle fermée»
Rappelons que dans le système vocalique du latin vulgaire l’opposition
qualitative des voyelles («voyelle ouverte / voyelle fermée») succède
à l’opposition quantitative («voyelle brève / voyelle longue») du latin
classique. En gallo-roman dans leur ensemble les voyelles longues deviennent
fermées, les voyelles brèves deviennent ouvertes et depuis ce
temps-là les voyelles s’opposent définitivement par cette nouvelle caractéristique
différentielle «ouverture / fermeture». Ainsi, s’est-il créé une
nouvelle opposition phonologique d’ordre qualitative «ouverture / fermeture
» qui a remplacé l’ancienne opposition phonologique latine d’ordre
quantitative «brièveté / longueur».
82
La formation des nouvelles diphtongues spontanées: la
«deuxième» diphtongaison
Rappelons qu’en latin vulgaire les diphtongues dites spontanées se sont
déjà formées à partir de deux voyelles libres accentuées ouvertes ę et o¸:
ę [ > ęę > eę > ié : cathédra > chaière
o¸[ > o¸ o¸> o o¸ > uó > ué : óve > nuóf > nuef
En gallo-roman il s’est produit la deuxième diphtongaison (VIe –
VIIIe ss.) qui touche les mêmes voyelles mais fermées qui ont passé respectivement
aux diphtongues éi ( > oi ) et óu ( > eu):
[ >ee > ei > éi > oi : mé > méi > moi
[ >oo > ou > óu > eu : flóres > flóurs > fleur
La formation des diphtongues dites conditionnées
Au VIIe s. apparaissent plusieurs diphtongues dites conditionnées
(ou combinatoires).
La formation des diphtongues conditionnées (ou combinatoires) est
due à l’influence des sons voisins. Les voyelles les plus fermées ī et ū ne
sont pas atteintes par la diphtongaison: lībra > livre, mūrum > mur.
Quatre sources ont fourni au français des diphtongues conditionnées:
A. La palatalisation de k et g en position intervocalique devant a, et aussi
en position devant une autre consonne: plaga > plaje > plaie, lactu > lait.
B. La palatalisation de k et g devant e. A la suite de cette mutation
se dégage un j: cáru > chiér, manducáre > manugare > mandgiér.
C. Les consonnes nasales n et m transforment les voyelles précèdentes
en diphtongues conditionnées nasalisées:
N. B. Les diphtongues ne se forment pas dans une syllabe fermée:
dente > d nt, lentu > l nt.
D. La vocalisation de l en u devant une consonne, suivie de la fusion
de u avec une voyelle précédente:
l + consonne > u + consonne : alba > aube, calidu > chaud.
Les causes de la diphtongaison restent inconnues. Il existe plusieurs
théories à ce sujet. Ainsi, G. Ascoli l’attribue à l’influence du substrat
celtique. Selon certains romanistes (tels И. М. Тронский, P. Verrier) la
diphtongaison aurait été causée par des faits de l’accentuation latine. Les
structuralistes (tels A. G. Haudricourt et A. G. Juilland et d’autres) recherchent
les causes de la diphtongaison dans les facteurs internes du
Combinaisons de sons Diphtongues nasalisées Exemples
a + n, m ã n, ã m manum > mã n; pane > pã n
e + n, m ien, iem venit > vient
83
développement du phonétisme français. Ces savants estiment que dans
les deux nouvelles séries des voyelles gallo-romanes ęe et o¸o les voyelles
auraient été très peu différenciées et la langue aurait réagi par une diphtongaison
pour éviter la confusion possible des phonèmes.
W. von Wartburg, H. Brinkmann, Th. Frigs, A. Dauzat expliquent la
diphtongaison française par l’influence immédiate des parlers germaniques (surtout
francs). Selon eux c’est le très fort accent tonique des parlers francs qui
aurait provoqué l’allongement et puis la diphtogaison des voyelles. Pourtant,
on ne saurait nier que les premiers exemples de la diphtongaison datent de bien
avant l’invasion franque, comme le démontre, par exemple, G. Straka.
Le déplacement de l’articulation en avant
En gallo-roman cette transformation a touché deux voyelles – ū et a.
Tonique ou atone, libre ou entravé, ū passe en [y]: nūdu > nu, jūrare
> jurer (la mouillure).
L’origine et la chronologie de cette altération sont très discutées, sans
aboutir à une solution unique. A.Dauzat et M.Cohen l’attribuent à l’influence
germanique, d’autres linguistes y trouvent les effets de l’influence
celtique. Les structuralistes (H.Lübke, A.G.Haudricourt, A.G.Juillard) supposent
que le passage ū > y est un processus qui se produit conformément
aux lois propres à la langue française (développement spontané).
Le développement de la voyelle a est conditionné par le caractère de
la syllabe: dans une syllabe ouverte a tonique (accentuée) passe à e, c’està-
dire, son articulation se déplace en avant de la cavité buccale: fràtre >
frère, etc. Dans une syllabe fermée a reste sans changements: arbore >
arbre. Il faut aussi tenir compte de l’entourage consonantique: devant
une nasale a > ai (diphtongaison conditionnée): manu > main; après une
palatale a > ie: caput > chief AF > chef FM.
L’évolution de à[ > e est un des principaux critères pour différencier
le français du provençal où a subsiste sans changement: chanter,
porter (français) kanta, portar (provençal).
Le développement de la nasalisation
C’est surtout en ancien français que les voyelles commenceront à se
nasaliser avec intensité devant n et m. Mais les débuts de ce phénomène
remontent à l’époque du gallo-roman et même plus tôt – en latin vulgaire,
où les voyelles a et e commencent à se prononcer avec une légère nuance
nasale: tantu > tãnt, plena > plěin.
2. Les changements syntagmatiques des voyelles.
La réduction partielle ou complète dans les positions faibles se poursuit
toujours: càlida > calda, dorm(i)tórium, nullum > nul, mittere > mettre.
Les conséquences de cette réduction pour le phonétisme du français
naissant sont importantes: il s’agit du racourcissement progressif du mot,
84
et pour la morphologie, car elle contribue à la déchéance des flexions,
donc, du système casuelle.
III. Les changements consonantiques.
Quant aux consonnes, leur développement dépend avant tout de leur
position dans le mot; le voisinage des consonnes et des voyelles est aussi
important (voir les positions fortes et faibles des consonnes).
1. Les changements paradigmatiques des consonnes.
Les changements paradigmatiques les plus importants sont les suivants:
– le développement de la palatalisation – la formation des affriquées;
– la formation des consonnes interdentales;
– l’apparition des nouvelles consonnes d’origine germanique w et h.
Le développement de la palatalisation – la formation des
affriquées
La palatalisation (mouillure des consonnes) est la principale modification
de l’évolution des consonnes parce qu’elle a abouti à la formation
des nouveaux phonèmes appelés affriqués.
Les affriquées sont des consonnes complexes. Des quatre affriquées
gallo-romanes deux sont sonores [dz, dj] et deux sont sourdes [ts, tƒ].
Il est à noter que la palatalisation se développe depuis le latin parlé
(IIe –Ve ss.) et s’accentue en gallo-roman (Ve – VIIIe ss.).
Palatalisation (mouillure) Formation des affriquées (vers VIII s.)
k+i, e > k' [ts]
centum [k’entu] cent [tsent]
k+a > k’ [tƒ]
Karolus [k’arolus] Charles [tƒarle]
g+e, i, a > g’ [dj]
gardinu [g'ardin] jardin [djardin]
argilla [arg' illa] argille [ardjile]
d+e [dz]
(duo)decim douze [d(o)udze]
d+i, b+i, n+i [dj]
rabia [rab’a] rage [radje]
somnium [somn'iym] songe [sondje]
p+i [tƒ]
hapia [hap’ ia] hache [hatƒe]
l+i, e [l’]
filia [fil’ ia] fille [fil’e]
n+i, e [n’]
vinea [vin’ ia] vigne [vin’e]
85
L’orthographe n’a pas toujours suivi le changement de la prononciation:
les lettres latines g et c qui en latin classique marquent respectivement
les sons [g] et [k], en gallo-roman servent à marquer les sons
affriqués [dj] et [ts]. Mais parfois l’écriture tâche de rendre plus fidèlement
la prononciation: Karolus [k’arolus] > Charles [tƒarle].
Les causes de la palatalisation ne sont pas claires. Certains savants
cherchent à expliquer la palatalisation par l’influence celtique (Ph. A. Becker),
d’autres, par l’influence germanique (F. Diez, A. Dauzat). Les recherches
faites par K. Ringenson lui ont permis de venir à la conclusion que la
palatalisation serait propre à la langue française de toutes les époques se
produisant sans aucune influence du substrat germanique. A. G. Haudricourt
et A. G. Juilland donnent une explication structurale de la palatalisation, en
se basant uniquement sur des faits internes du développement linguistique.
La formation des consonnes interdentales
Il s’est formé en gallo-roman deux consonnes interdentales (à la suite
de l’affaiblissement des consonnes d, t, dans les positions fables – intervocalique
et finale) đ et θ: vita > vida > viđa > via; amat[amat] > amet [ameθ].
L’apparition des nouvelles consonnes d’origine germanique h et w
Le système phonologique du gallo-roman s’enrichit à l’époque de
deux consonnes d’origine germanique: h et w.
Rappelons que le h latin a disparu depuis le IIe s. de n. ère: homo > omo.
Un autre h, du superstrat germanique, est adopté dans la prononciation
des Gallo-Romains vers le Ve s.: hanka > hanche.
La pronociation du h germanique comme un souffle a survécu jusqu’aux
XVe – XVIe ss. et subsiste encore de nos jours dans les dialectes
de l’est et du Midi. En français littéraire il n’en reste que l’interdiction de
la liaison devant le h aspiré.
Le w germanique ne se rencontre qu’en position forte à l’initiale du
mot: *werre > guerre, Wilihelm > Guillelme > Guillaume, *want > gant.
2. Les changements syntagmatiques des consonnes.
Parmi les changements syntagmatiques les plus importants sont:
– la réduction et la chute des consonnes dans les positions faibles;
– l’introduction des consonnes accessoires (dites d’appui);
– l’assimilation / la dissimilation;
– la métathèse.
La réduction et la chute des consonnes dans les positions faibles
La réduction (partielle ou complète) se produit dans les positions
faibles: intervocalique (A), devant une autre consonne (B), à la fin du
mot (C). Rappelons qu’en position forte les consonnes subsistent, à quelques
rares exceptions.
86
A. Dans la position intervocalique les consonnes sourdes deviennent
sonores (réduction partielle):
Très souvent le processus ne s’arrête pas là et les consonnes intervocaliques
deviennent sujets à la réduction complète: focum > fuou >
feu, habeo >*aio >ai.
B. Dans le groupe consonantique. Cette réduction concerne avant tout
les consonnes doubles identiques (géminées): vellit > velit. Dans le groupe
de deux consonnes la réduction se fait au détriment de la première consonne:
mensa > mesa. Dans le groupe de trois consonnes la réduction se
fait au détriment de la consonne médiane: comp(u)tare > com ter, dormitorium
>*dorm’torui >dor toir.
Avant de disparaître les consonnes subissent une réduction partielle (en
forme de sonorisation ou d’assourdissement, par ex.): *eclesia > église.
Cette simplification des groupes consonantiques représente la tendance
essentielle de l’époque: septem > sete > set ( > sept reconstitué
plus tard par les grammairiens).
L’aboutissement de la consonne en une voyelle n’est pas rare à l’époque
et est appelé la vocalisation: fructu > fruit, nocte > nuit.
La réduction des groupes consonantiques représente l’une des tendances
phonétiques les plus stables dans l’histoire du français et joue un
rôle considérable dans la constitution de la syllabe type du français, la
syllabe ouverte. La tendance à la syllabe ouverte se manifeste donc depuis
le latin vulgaire et atteint son comble vers l’époque de la stabilisation
du français en tant que langue nationale (XVIe s.).
C. A la fin de mots les consonnes:
– se réduisent partiellement (en particulier s’assourdissent, s’il s’agit
d’une consonne sonore);
– se réduisent complètement: septem > septe .
Les consonnes sonores à la fin des mots deviennent sourdes: largu
> larc, grande > grant; et même disparaissent: clave > clef > clé (assourdissement
> disparition de la consonne finale assourdie).
L’introduction des consonnes accessoires (dites d’appui)
Le plus souvent elles sont épenthétiques et apparaissent dans les
groupes consonantiques secondaires (ceux qui se sont formés à la suite
des réductions vocaliques) pour faciliter la prononciation:
p > b ripa > riba
t > d vita > vida
s > z rosa > rose
87
L’assimilation / la dissimilation
Ces processus débutés en latin vulgaire se poursuivent.
La dissimilation est un processus qui de deux phonèmes identiques,
se trouvant même à distance fait deux sons différents: terebra non telebra.
L’assimilation: cognosco > *connosco > conosco ( > connaître),
hominem > homne > homme. L’assimilation partielle (qui ne s’est pas
encore acheveé) est l’assourdissement d’une consonne: plebs non pleps.
La métathèse
La métathèse, le déplacement des sons ou même des syllabes: scintilla
> stincilla > étincelle, cupreum > cuivre.
IV. L’évolution des voyelles et des consonnes depuis le latin
classique.
L’évolution des voyelles depuis le latin classique
L’évolution des consonnes depuis le latin classique
Questions ( * - questions demandant des réflexions)
I. 1. Quel est le type d’accentuation gallo-roman?
L’influence du superstrat germanique, a-t-elle renforcé ou affaibli
l’accentuation dynamique du latin vulgaire?
Quels sont les aboutissements morphologiques de l’accentuation
dynamique?
II. 1. Quels sont les principaux changements paradigmatiques des
voyelles?
Quelle est la nouvelle opposition phonologique qui s’est constituée
dans le vocalisme du gallo-roman?
Consonne
épenthétique
Combinaisons
de consonnes Exemples
t sr > str *ess(e)re > estre (> être)
b mr > mbr cam(e)ra > chambre
d lr > ldr *vol(e)raio > voldrai ( > voudrai)
LCl: ă ā ě ē ī o ō й ū ae oe au
\/ | \/ | | \ / | | | |
GR: a ę e i o¸ o u ę e o
LCl: p t k b d g f s l r m n h
| /\ / | \ | / | \ /\ | /\ /\ | | /\ | \
GR: p t k tƒ ts b d dz đ g dj f s z l l’ r m n n’ h w
88
Les voyelles longues latines, en quelles voyelles «gallo-romanes» se
sont-elles transformées?
Les voyelles brèves latines, en quelles voyelles «gallo-romanes» se
sont-elles transformées?
Quelles sont les voyelles touchées par la deuxième diphtongaison?
* Quelles sont les conditions nécessaires et obligatoires pour que la
diphtongaison spontanée ait lieu?
Dans quelles conditions se produit la diphtongaison conditionnée
(combinatoire)?
* Par quoi la deuxième diphtongaison diffère-t-elle de la première?
* Qu’ont-elles de commun?
A quoi les linguistes attribuent-ils la diphtongaison?
Quelles sont les voyelles dont l’articulation s’est déplacée en avant?
Quel est le nouveau phonème qui s’est formé à la suite de la mouillure
du u latin?
* A quoi serait dû ce déplacement?
* Est-ce que le déplacement en avant de a s’est produit sur tout le
territoire gallo-roman? *Pourquoi?
2. Quels sont les principaux changements syntagmatiques des voyelles?
Quels sont les aboutissements morphologiques de la réduction des
voyelles à la fin du mot?
III. 1. Quels sont les principaux changements paradigmatiques des
consonnes?
A quoi les linguistes attribuent-ils la palatalisation?
Quelles sont les nouvelles consonnes qui ont apparu à la suite de la
palatalisation?
* Le français moderne possède-t-il des consonnes affriquées? Quelles
langues romanes en possèdent?
Les consonnes interdentales se sont-elles conservées jusqu’à nos
jours? * Pourquoi?
Le gallo-roman, a-t-il emprunté des consonnes «étrangères»? Quelles
sont ces consonnes? Se sont-elles gardées jusqu’à nos jours?
* Comment peut-on deviner l’origine germanique de certains mots
en français moderne?
2. Quels sont les principaux changements syntagmatiques des consonnes?
* Quels sont les aboutissements morphologiques de la réduction des
consonnes finales?
89
IV. Le système vocalique du gallo-roman s’est-il enrichi ou appauvri
par rapport à celui du latin classique?
Le système consonantique du gallo-roman s’est-il enrichi ou appauvri
par rapport à celui du latin classique?
* Quels sont les changements phonétiques qui seraient attribués au
substrat celtique?
* Quels sont les changements phonétiques qui seraient dus au superstrat
germanique?
Quels sont les sons qui n’existent plus en français moderne?
Devoirs
1. Définissez: un changement paradigmatique / syntagmatique, l’accent
mélodique, l’accent dynamique, une opposition phonologique, une
position faible des consonnes (initiale, finale, intervocalique), une position
faible des voyelles (non accentuée), une diphtongue, la diphtongaison
spontanée / conditionnée (combinatoire), la réduction (partielle, complète),
la sonorisation / l’assourdissement, un groupe vocalique / consonantique
primaire / secondaire, un son accessoire (d’appui), la palatalisation
(la mouillure), une affriquée, la métathèse, la prothèse, l’épenthèse,
l’assimilation / la dissimilation.
2. Nommez les mutations phonétiques qui sont caractéristiques seulement
au gallo-roman et celles qui représentent l’évolution des transformations
débutées en latin vulgaire; celles qui se sont achevées en galloroman
et celles qui vont encore évoluer.
3. Précisez les origines (latines, celtiques, germaniques) des changements
survenus ou se déroulant à cette époque.
4. Expliquez la différence entre une diphtongue spontanée et une
diphtongue conditionnée (voir II. 1.).
5. Décrivez le processus de la formation des diphtongues.
e [ >ee > ei > éi :
o [ >oo > ou > óu :
Expliquez quelles sont les mutations phonétiques qui y ont eu lieu.
(voir II. 1.).
6. Etudiez l’exemple suivant et dites quelle est cette transformation:
parlàre > parler, parlàtis > parlez, parlàtu > parlé, parlàrunt > parlèrent
(voir II. 1.).
7. Etudiez les mots suivants et nommez les processus phonétiques
qui y ont eu lieu.
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Dans quelles positions ont eu lieu ces transformations – fortes ou
faibles? Précisez chaque fois ces positions (accentuée, non accentuée,
initiale, finale, intervocalique, devant une consonne, etc.)
8. Dans chacun des mots ci-dessous il s’est produit deux ou trois
mutations. Trouvez-les et expliquez-les:
figulus > figel
lanius > laneo
botruus > butro
obstetrix > opsetris
capitulum > capiclum
caballum > cheval
9. Expliquez les transformations suivantes
ripa > riba > riue [riwe] > rive [ riv]
pacare > pagare > pajar [pag ar] > payer
10. Etudiez la mutaion de la consonne intervocalique t. Son évolution
passe par plusieurs étapes:
– la consonne sourde passe à la consonne sonore (au IVe s.) t >
d: vita > vida;
Processus Exemples
1 Réduction des voyelles non accentuées A
Theophilus > Izophilus
brattea > brattia
lancea > lancia
balteus > baltius
linteum > lintium
2 Nasalisation B formica > furmica
3 Assimilation C
musivum > museum
avus > aus
favilla > failla
pavor > paor
4 Fermeture des voyelles longues D scintilla > stincilla
5 Métathèse E pancarpus > parcarpus
Réduction complète des consonnes
intervocalques digitus > dicitus
plebs > pleps
6 Réduction partielle des consonnes
intervocalques F bravium > brabium
debere > deveir
Réduction des groupes consonantiques G
calida > calda
orbis > orbs
stabulum > stablum
tribula > tribla
7 Réduction partielle (assourdissement) H occasio > occansio
8 Sons accessoires I terebra > telebra
9 Palatalisation J auctoritas > autoritas
10 Dissimilation K frustum > frustrum
91
– la consonne sonore d passe à la consonne interdentale (au VIIIe s.)
d >đ: vida > viđa;
– l’interdentale đ disparaît à la fin du XI e s.: viđa > via.
Les processus linguistiques sont-ils lents? Combien de siècles (périodes)
a duré cette évolution?
11. De quelle origine sont les mots suivants: hache, haïr, heurter,
hareng? Quel élément phonétique aide à déterminer l’origine des ces
mots? (voir III. 1.).
Cours théorique 5
Le gallo-roman: Les changements grammaticaux
L’objectif d’étude
Apprendre les particularités grammaticales du gallo-roman
L’apprenant doit savoir donner la définition des termes suivants:
un changement paradigmatique / syntagmatique, un cas, une forme casuelle
( = flective), l’analytisme (forme analytique), le synthétisme (forme
synthétique), l’analogie, l’étymologie, une déclinaison, une conjugaison,
un groupe de mots, une proposition simple, une proposition complexe
(= une phrase), une proposition juxaposée, coordonnée, subordonnée
L’apprenant doit savoir
Les modifications survenues dans le nom, l’adjectif, les pronoms, le verbe
Les tendances se développant dans le système morphologique du
gallo-roman
Les traits particuliers et principales tendances syntaxiques du gallo-
roman
L’apprenant doit savoir faire
Analyser les mutations grammaticales survenues en gallo-roman
Trouver les faits d’ordre phonétique entraînant des transformations
morphologiques
Expliquer les causes des transformations grammaticales survenues
en gallo-roman
Etablir les relations structurales entre les changements tenant compte
que la langue est un système
Déterminer les origines (celtiques, germaniques) des changements
grammaticaux
92
Plan
I. Les changements morphologiques survenus en gallo-roman.
1. Le nom.
2. L’adjectif.
3. Les pronoms.
4. Le verbe.
5. L’adverbe.
II. Les particularités de la syntaxe du gallo-roman.
I. Les changements morphologiques survenus
en gallo-roman.
La tendance essentielle de l’évolution du système grammatical du
gallo-roman est l’emploi de plus en plus large des formes analytiques au
détriment des formes synthétiques: la flexion disparaît graduellement et
les relations syntaxiques entre les mots dans la phrase s’expriment à l'aide
des outils plus souvent qu’en latin classique.
1. Le nom.
Le substantif en gallo-roman possède les même catégories grammaticales
qu’en latin classique: les catégories du genre, du nombre et du cas. Le
système grammatical du nom a subi d’importantes modifications mais elles
s’inscrivent dans le cadre de la tendance principale de l’évolution du français:
la transformation du synthétisme latin en analytisme français.
Le principal changement paradigmatique en gallo-roman est la
dégradation du système casuel latin qui se présente sous deux aspects:
– réduction des types de déclinaison;
– réduction du nombre des cas.
On atteste aussi une forte tendance à l’analogie.
La dégradation du système casuel
La réduction des types de déclinaison
Les cinq déclinaisons du nom en latin classique sont reduites à trois
en gallo-roman.
La réduction du nombre des cas
Le nombre de cas en gallo-roman se réduit à deux (à la différence
du latin classique qui en possédait six).
Ainsi, vers les VIIe – VIIIe ss. le système casuel du gallo-roman
comprend trois types de déclinaison:
93
L e p r e m i e r type de déclinaison
Substantifs du féminin en -a
(en voie de disparition)
Au pluriel de la première déclinaison la flexion primitive -ae cède
place à la flexion -as par analogie avec Acc pl.: terrae Nom. pl. > terras
Nom. pl.
Il serait possible que le maintien du -s final dans les langues romanes
dites occidentales – la marque de pluriel – soit dû au substrat celtique.
L e d e u x i è m e type de déclinaison
Substantifs du masculin en -us, -er
(déclinaison dite «croisée»)
L e t r o i s i è m e type de déclinaison
(en voie de disparition)
Substantifs du féminin et du masculin
Parisyllabiques (парносложные)
Imparisyllabiques (непарносложные)
* parfois ces formes ont été refaites par analogie avec anni (II type
de déclinaison).
Une forte tendance à l’analogie
Elle s’accentue et reconstruit le système casuel afin de le rendre
plus homogène, unifié, simple, régulier.
Singulier Pluriel
Nom. terra folia terrae (-as) foliae (-as)
Acc. terra(m) folia(m) terras folias
Singulier Pluriel
Nom. ann(u)s ann(i)
Acc. ann(u)(m) ann(o)s
Singulier Pluriel
Nom. pater patr(e)s (*patri)
Acc. patr(e)(m) patr(e)s
Singulier Pluriel
Nom. com(e)s comit(e)s (*comiti)
Acc. comit(e)(m) comit(e)s
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A.
L e p r e m i e r type de déclinaison
Les féminins en -a
Grâce à l’unification des flexions au pluriel les noms féminins en
gallo-roman ont perdu la catégorie du cas depuis très tôt.
B. Le troisième type, imparisyllabiques. Ces noms ont deux types
de radicaux qui s’opposent – le radical du Nom. sing. et celui de l’Accusatif.
La force d’analogie les régularise. Ainsi :
Grâce à l’unification des radicaux les féminins du III type ne se
déclinent plus dès le gallo-roman.
Le principal changement syntagmatique est l’emploi de plus en plus
large des prépositions.
Ainsi, la réduction des formes casuelles est équilibrée par des constructions
prépositionnelles: fratris liber > liber de fratre.
Le plus souvent la valeur du Génétif est rendue à l’aide de la préposition
de, celle du Datif à l’aide de la préposition ad, celle de l’Ablatif à
l’aide des prépositions de, ab, ex: occidam lancea > occidam de lancea,
ait mihi > ait ad me, dicens ei > dicens ad eum, etc.