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Gustave Flaubert (1821-1880)

Gustave Flaubert, fils d’un chirurgien de Rouen, eut très tôt la passion de la littérature. A dix-huit ans, il vint pour la première fois à Paris pour y suivre des cours de droit. Accueilli chez le sculpteur Pradier où il rencontre les célébrités du romantisme, il se lie d’amitié avec Hugo, sa grande admiration. Il vient d’entreprendre l’« Education sentimentale » quand, brusquement, il est terrassé par une maladie nerveuse. Alors, Flaubert se retire dans sa propriété de Croisset, non loin de Rouen. Il se consacre désormais à ses romans, composés patiemment, au prix d’un labeur méthodique et acharné.

En 1849, il terminait son premier ouvrage « La Tentation de Saint-Antoine », que ses amis comdamnèrent et lui conseillèrent d’écrire l’histoire véridique du médecin normand dont la femme adultère vient de s’empoisonner. Ce sera « Madame Bovary ». Le livre parut d’abord dans la « Revue de Paris », en 1856. Quelques mois plus tard, l’auteur, accusé d’obscénité, passait en jugement. Il fut d’ailleurs acquitté et son roman obtint un succès immédiat. Bientôt après on reconnut dans ce roman le premier chef-d’oeuvre de l’art réaliste après la révolution de 1848.

En automne 1859, Flaubert commence à travailler son nouveau roman « Salambô » dont le sujet est pris dans l’histoire de Carthage du IIIe siècle avant notre ère. Ce roman parut en 1862.

En 1863, Flaubert ébauche le plan d’un nouveau roman l’  « Education sentimentale » où il voulait faire l’histoire morale des hommes de sa génération.

En 1877 paraissent les « Trois Contes », dont le premier, « Un coeur simple », est reconnu comme un chef-d’oeuvre nouveau.

De plus en plus éprouvé par la maladie qui n’avait cessé de le tourmenter toute sa vie, Gustave Flaubert mourut le 8 mai 1880.

Madame Bovary

Emma poussa la porte et entra. [...] Elle s’était appuyée contre l’embrasure de la mansarde et elle relisait la lettre avec des ricanements de colère. Mais plus elle y fixait d’attention, plus ses idées se confondaient. Elle le revoyait, elle l’entendait, elle l’entourait de ses deux bras ; et des batttements de coeur, qui la frappaient sous la poitrine comme à grands coups de bélier, s’accéléraient l’un après l’autre, à intermittences inégales. Elle jetait les yeux tout autour d’elle avec l’envie que la terre croulât. Pourquoi n’en pas finir ? Qui la retenait donc ? Elle était libre. Et elle s’avança, elle regarda les pavés en se disant :

  • Allons ! allons !

[...] Elle se tenait tout au bord, presque suspendue, entourée d’un grand espace. Le bleu du ciel l’envahissait, l’air circulait dans sa tête creuse, elle n’avait qu’à céder, qu’à se laisser prendre ; et le ronflement du tour ne discontinuait pas, comme une voix furieuse qui l’appelait.

  • Ma femme ! ma femme ! cria Charles.

[...] L’idée qu’elle venait d’échapper à la mort faillit la faire s’évanouir de terreur ; elle ferma les yeux... Et il fallut descendre ! il fallut se mettre à table !

Elle essaya de manger. Les morceaux l’étouffaient. [...] Tout à coup, le souvenir de la lettre lui revint. L’avait-elle donc perdue ? Où la retrouver ? Mais elle éprouvait une telle lassitude dans l’esprit, que jamais elle ne put inventer un prétexte à sortir de table. Puis elle était devenue lâche ; elle avait peur de Charles ; il savait tout, c’était sûr ! En effet, il prononça ces mots singulièrement :

  • Nous ne sommes pas près, à ce qu’il paraît, de voir M. Rodolphe.

  • Qui te l’a dit ? fit-elle en tressaillant.

  • Qui me l’a dit ? répliqua-t-il un peu surpris de ce ton brusque ; c’est Girard, que j’ai rencontré tout à l’heure à la porte du Café Français. Il est parti en voyage, ou il doit partir. [...] Quoi donc t’étonne ? Il s’absente ainsi de temps à autre pour se distraire, et, ma foi ! je l’approuve. Quand on a de la fortune et que l’on est garçon ! – Du reste, il s’amuse joliment, notre ami ! c’est un farceur.[...]

Tout à coup, un tilbury bleu passa au grand trot sur la place. Emma poussa un cri et tomba roide par terre, à la renverse.

En effet, Rodolphe, après bien des réflexions, s’était décidé à partir pour Rouen. Or,...il lui avait fallu traverser le village, et Emma l’avait reconnu à la lueur des lanternes qui coupaient comme un éclair la crépuscule.

Le pharmacien, au tumulte qui se faisait dans la maison, s’y précipita. La table avec toutes les assiettes, était renversée ; de la sauce, de la viande, les couteaux, la salière et l’huilier jonchaient l’appartement ; Charles appelait au secours ; Berte, effarée, criait : et Félicité, dont les mains tremblaient, délaçait Madame, qui avait le long du corps des mouvements convulsifs. [...]

-Parle-nous ! disait Charles, parle-nous ! Remets-toi ! C’est moi, ton Charles qui t’aime ! Me reconnais-tu ? Tiens, voilà ta petite fille ; embrasse-la donc !

L’enfant avançait les bras vers sa mère pour se pendre à son cou. Mais, détournant la tête, Emma dit d’une voix saccadée :

-Non, non... personne !

Elle s’évanouit encore. On la porta sur son lit. Elle restait étendue, la bouche ouverte, les paupières fermées, les mains à plat, immobile et blanche comme une statue de cire. Il sortait de ses yeux deux ruisseaux de larmes qui coulaient lentement sur l’oreiller.

Charles, debout, se tenait au fond de l’alcôve, et le pharmacien, près de lui, gardait ce silence méditatif qu’il est convenable d’avoir dans les occasions sérieuses de la vie.

-Rassurez-vous, dit-il en lui poussant le coude, je crois que le paroxysme est passé.

-Oui, elle repose un peu maintenant ! répondit Charles, qui la regardait dormir. Pauvre femme ! ... pauvre femme !...

[...] Mais Emme, se réveillant, s’écria :

-Et la lettre ? Et la lettre ?

On crut qu’elle avait le délire ; elle l’eut à partir de minuit : une fièvre cérébrale s’était déclarée.

Pendant quarante-trois jours Charles ne la quitta pas. Il abandonna tous ses malades ; il ne se couchait plus, il était continuellement à lui tâter le pouls, à lui poser des sinapismes, des compresses d’eau froide. [...] Il appela M. Canivet en consultation ; il fit venir de Rouen le docteur Larivière, son ancien maître ; il était désespéré. Ce qui l’effrayait le plus, c’était l’abbattement d’Emma ; car elle ne parlait pas, n’entendait rien et même semblait ne point souffrir, - comme si son corps et son âme se fussent ensemble reposés de toutes leurs agitations. 

D’après Gustave Flaubert, Madame Bovary.

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