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2. Dilation vocalique

§ 100. Toutes les fois que l'influence s'effectue а distan­ce, d'une syllabe а une autre, même par-dessus les sons in­termédiaires, il y a assimilation а distance ou bien dilation (M. Grammont). Ce sont surtout les voyelles qui sont sujettes а cette espèce d'assimilation. La dilation est donc vocalique en français. Citons quelques

1 A. A. Реформатский. едение языкознание. Учпедгиз, M., 1955, § 35.

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exemples du XVIIe siècle : cocombre>concombre, bobance> >bombance etc. x

Le français moderne est riche en exemples de dilation vo­calique régressive : elle se fait d'une syllabe accentuée а une syllabe inaccentuée. Il se produit généralement une assimila­tion de degré d'aperture. La voyelle accentuée fermée étant plus forte assimile la voyelle inaccentuée de la syllabe pré­cédente. Notons que la syllabe inaccentuée est toujours ouverte. Il importe de souligner que les voyelles assimilantes sont [i, e, y] :

j'aime ['çет] — aimer [e'me], aigre ['egn] — aigri [e'gpi],bête ['bst] — bêtise [be'ti:z], tête ['têt] — têtu [te'ty] ; abêtir [abe'tiin], abaisser [abe'se], aigu [e'gy], aiguille [e'gqij], ailé [e'ie], aîné [e'ne], maigrir [me'gKirK], etc.

Dans les manuels on appelle ce phénomène harmo­nie ou harmonisation vocalique.

La dilation vocalique affecte d'ordinaire le son [ç]. Cet­te espèce d'assimilation a lieu également а l'intérieur du groupe accentuel entre les syllabes appartenant а des mots différents : tu y es [ty i 'e] — y es-tu ? [i e 'ty].

La dilation vocalique est extrêmement fréquente en style parlé (familier), elle peut entraîner certaines alternances (voir § 105).

A notre avis, il y a autre chose qui contribue également au passage du [e] en [e] en syllabe inaccentuée. En effet, dans certains mots, tels bétail, bêta [be'taj], [be'ta], l'har­monisation vocalique ne joue pas puisque la voyelle accentuée est une voyelle ouverte. De toute façon, ce n'est pas la di­lation vocalique qui décide du changement [s>e] dans les deux mots cités. Quelques autres causes doivent forcément entrer en jeu. Parmi elles, la raison essentielle relève du caractère de la syllabe affectée par la dilation vocalique, car la modification atteint toujours la syllabe ouverte du radical. Or, le phonème [e] n'existe qu'en syllabe ouverte. Il y a donc lieu de supposer que le rapport « [e]~»syllabe

1 On cite souvent dans les manuels, parmi les exemples d'assimilation progressive, les mots empruntés de l'italien—carnevale > carnavale, mas-cherata > mascarade. Dans ce cas il s'agit plutôt d'une dilation vocalique régressive puisque la voyelle accentuée est aussi un [a] ou bien d'une dilation double, l'initiale et la finale ayant exercé également leur influence sur le [e] du milieu en même temps. L'influence du [a] final a été tou­tefois plus considérable en raison de l'accent qu'elle porte.

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ouverte » puisse avoir un effet rétroactif et créer un rapport inverse « pour une syllabe ouverte inaccentuée un son fermé (e] ». Cette tendance se manifeste dans la langue parlée d'une façon assez nette: descendre [de'sd:dr], effort [еЪ:ê], es­sence [e'srs], etc. Nous avons choisi а dessein des mots com­portant une voyelle ouverte dans la syllabe accentuée.

L'harmonisation vocalique se combine donc avec un phé­nomène d'ordre phonématique, en raison du rôle particulier que joue l'opposition [s — e] dans le système des phonèmes français.

La position inaccentuée contribue non moins au passage [s — e] puisque [s] non accentué en syllabe ouverte se réa­lise, dans le langage, sous forme de sa variante la plus fer­mée.

Dans certains mots, le voisinage d'une consonne fermante, telle que [z] accentue le passage du [s] en [e] soit — plai-siï [ple'zi.-ê], aisé [e'ze], braiser [bne'ze], apaiser [ape'ze]. l Néanmoins, ces mots connaissent deux prononciations, ce qui dépend du style, le langage soutenu employant la forme avec [e].

La dilation vocalique affecte d'autres voyelles ouvertes qui ont leurs correspondantes fermées, mais elle est alors beaucoup moins nette. M. Grammont attribue le caractère fermé du [o] dans vomir, obus а J'influence des voyelles ac­centuées fermées. Par contre, le [o] dans la syllabe initiale du mot- aurore, serait dû au Û portant l'accent final du mot.2 Cependant il importe de signaler, pour ce dernier exemple, que au se trouve en présence du [r] — consonne ouvrante. Il s'agit donc de deux influences simultanées qui convergent aux mêmes fins.

Le passage du [o] au Û en syllabe inaccentuée dans les mots hôtel, côtelette, automne, mauvais, etc. peut s'expli­quer également par la dilation vocalique.

En ce qui concerne la troisième voyelle ouverte [æ], el­le subit également l'influence de la voyelle accentuée qui la suit, mais le phénomène de dilation n'est pas aussi répan­du qu'il l'est pour [e], ni aussi net. La voyelle [æ] reçoit un caractère plus fermé sans passer а [0] : lever [loeve], ceci [sæsi], etc.

1 Le phénomène a eu lieu également а différentes époques de l'évolu­tion du français. Il y a des cas oщ l'orthographe a changé sous l'influencede la prononciation : grès et ses dérivés — grésil, gréseux.

2 M. Grammont. Traité de phonétique. P., 1956, p. 266.

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L'histoire de la langue nous fournit quelques exemples de dilation consonantique écartiller>écarquillert que le fran­çais littéraire moderne ne connaît plus.