Добавил:
Upload Опубликованный материал нарушает ваши авторские права? Сообщите нам.
Вуз: Предмет: Файл:
Le village de Coule.doc
Скачиваний:
14
Добавлен:
17.09.2019
Размер:
173.57 Кб
Скачать

La petite-fille de père Henri

L'école de Mlle Anybel est une très bonne école. Père Henri et ses frères passent par un long couloir. Une demoiselle les voit:

— Mademoiselle la directrice? à cette heure-ci? Je vais voir si elle est chez elle.

— Elle est chez elle! dit le père Henri. Une demoiselle noire vient.

— Mademoiselle la directrice, ce monsieur ...

— Je sais! dit Mlle la directrice. Entrez, messieurs.

— Où est-elle? répond père Henri.

— Qui?

— Mais ... Marianette!

— Je vous ai déjа dit: elle dort. Les enfants dorment quand il est plus de dix heures.

— Je veux la voir.

— Parlons d'abord! dit Mlle la directrice. Cette enfant est très délicate. Elle a eu beaucoup de chagrin. Elle est une excellente élève.

— Elle a eu le prix d'excellence! dit Jean-le-prof.

— C'est normal, si elle est excellente! dit père Henri. Mais je veux la voir d'abord.

Mlle la directrice comprend qu'on ne peut rien faire et dit avec un soupir:

— Venez, venez! Mais marchez sans bruit.

Ils marchent derrière la directrice sans bruit. Mlle la directrice traverse un long couloir et grand-père Henri voit aux murs des des­sins d'enfants, des bouquets de fleurs, des guirlandes. Par une porte ouverte, il voit des classes claires et gaies, de grandes fenêtres ... Mais il manque quelque chose ici. Quoi? ...L'air? ... Le silence? Les arbres? ... Les fleurs? ... Les ani­maux? ... La liberté? C'est ça: il manque la liberté de sortir de lа, de temps en temps, pour aller voir quelqu'un qui vous attend et qui vous aime.

— Entrez, messieurs.

Grand-père Henri entre dans une grande chambre. Des lits à droite. Des lits à gauche.

Des enfants dorment. Mais où est Marianette? C'est un magasin de «marianettes», cette chambre! Pour trouver quelqu'un, il faut mettre des étiquettes comme aux poupées des magasins. La directrice prend sa petite lampe électrique. Grand-père Henri voit les étiquettes sur les lits: les unes après les autres. Voilа enfin. C'est lа: Marianette Forêt.

Grand-père Henri s'approche de son lit. Il regarde attenti­vement. Il ne voit pas le visage sous les cheveux blonds de la peti­te. Marianette, sa femme, avait aussi ces cheveux blonds. Et Clai­re, la fille de sa pauvre Marianette, sa fille et la mère de cette Marianette-lа qui dort avait aussi ces cheveux blonds. Si elle ouvre les yeux, cette petite poupée qui dort, il verra ses yeux bleus. Il est sûr qu'elle a des yeux bleus, que sa bouche est petite, que sa voix est une petite musique douce.Il a pris entre ses mains le petit visage de l'enfant. Il le regarde. Elle a pleuré? Marianette a pleuré avant de s'endormir?

— Mademoiselle, mais cette enfant a pleuré!

— Peut-être! dit Mlle la directrice. Cette petite aimait ses parents.

— Vous ne savez pas que Marianette a pleuré? ... Mlle la directrice n'a rien répondu.

Grand-père Henri a pris la petite dans ses bras trop grands, trop solides.

— Que faites-vous, monsieur? Laissez cette enfant qui dort et qui m'est confiée. Que faites-vous?

— Je l'emporte.

— Monsieur, je suis la directrice de cette école ...

— Et moi, je suis son grand-père. C'est la fille de ma fille et je l’emporte.

— Monsieur ...

Grand-père Henri emporte Marianette qui dort.

— Mais où vas-tu? crie Jacques le médecin.

— Attends, Henri! dit le prof Jean.

— Je vais chez l'un de vous jusqu'а demain et puis, demain, j'irai à la gare de Lyon; et le soir nous serons à Coule-Vent.

— Réfléchis, dit Jacques le médecin, réfléchis!

— Est-ce que tu peux élever une enfant de neuf ans?

— Cousine Madeleine m'aidera.

— Mais ... l'école?

— Je serai son maître.

— Tu en feras une sauvage! dit Jacques le médecin et c'est dommage. Je te répète que cette petite est un prix d'excellence!

— Très bien! dit grand-père Henri, j'aime les enfants intelli­gents.

— Qui contrôlera ses études?

— Chaque année, crie grand-père, chaque année, en juin, elle viendra passer les examens de passage pour la classe supérieure.

— Et sa santé?

— Sa santé? crie grand-père Henri, sa santé? Mais elle est pâle et maigre, elle pleure souvent. Tu la verras en juin prochain. Mais partons d'ici. Je vais chez toi pour ce soir.

Marianette se réveille. Elle ouvre ses yeux bleus, elle regarde et commence à pleurer.

— Vous lui faites peur! crie Mlle la directrice.

— Elle a peur de toi, tu vois! crie Jean-le-prof.

— Marianette, dit grand-père Henri tout bas, je suis ton grand-père, nous allons à Coule-Vent. C'est le pays de ta maman. C'est ton pays aussi.

D'abord, Marianette regarde et ne répond rien. Puis elle dit:

— Tu es grand-père Henri? Je te reconnais bien. Maman m'a parlé de toi ... Et ta pipe? Où est ta pipe?

— Elle est lа! dit grand-père Henri et montre sa poche.

— Maman m'a dit que tu l'avais toujours aux dents. C'est vrai?

— C'est vrai.

— Alors, pourquoi est-ce qu'elle est dans ta poche?

— C'est qu'à Paris, dit père Henri, c'est qu'à Paris je ne fais plus ce que j'aime faire. Partons d'ici!

— Monsieur, c'est une fillette si délicate. Elle est heureuse chez nous, dit Mlle la directrice. Mais, si vous l'emmenez, nous allons l'habiller et lui faire sa valise. Elle ne peut pas partir en chemise de nuit. Venez, mon enfant.

— Oui, mademoiselle. Mais tu m'attends, grand-père?

— Bien sûr que je t'attends.

Grand-père Henri demande:

— Tu veux vraiment que je t'attende, petite? Tu n'as pas de peine à quitter tes camarades? Tu veux bien quitter Paris? Tu veux bien venir avec moi à Coule-Vent? Tu n'as pas de peine à quit­ter ton oncle Jean et ton oncle Jacques?

Marianette regarde tout le monde.

— Oh! oui, dit-elle, je veux aller avec toi. Chaque été, maman voulait m'envoyer à Coule-Vent. Elle serait contente si elle me voyait partir. Attends-moi, grand-père. Je vais vite faire ma va­lise!

Marianette est revenue habillée comme une poupée.

Un manteau bleu, un chapeau de même couleur sur ses cheveux blonds, des souliers blancs, des gants blancs, un petit sac à la main.

— Tu viens, grand-père?

— Vous ne me dites pas au revoir? dit la directrice.

— Adieu, mademoiselle! dit Marianette.

— Au revoir, mon enfant! N'oubliez jamais votre école et vos professeurs.

— Je n'oublierai pas, mademoiselle.

— Et puis, écrivez-nous souvent. Nous voulons savoir quels progrès vous ferez.

— J'écrirai, mademoiselle.

Dans l'escalier, Marianette et son grand-père ouvrent la marche, puis Jacques le médecin, puis Jean-le-prof.

— Grand-père?

— Marianette?

— Grand-père Henri, je suis très contente de partir avec toi à Coule-Vent. Je pense ... que plus jamais je ne serai triste.

— Tu étais triste, Marianette?

— Tout le temps.

Grand-père est ému, mais il ne sait pas parler aux petites filles. Alors, il dit tout bas: «J'ai bien fait!»

Marianette et grand-père Henri sont prêts à partir pour Coule-Vent. Mais grand-père a, tout à coup, une grande inquiétude. Il dit à la petite fille:

— Ouvre ta valise! Je veux voir ce qu'il y a dans ta valise. Il regarde les blouses, les jupes, les beaux souliers, tous ces vêtements de poupée.

— Viens, dit-il. Qu'est-ce que tu veux faire avec ces vêtements de poupée? A la campagne il faut avoir des vêtements plus solides et plus chauds. Je voudrais t'acheter ces vêtements.

— Des vêtements ... de garçon?

— Si tu veux.

— Chic! s'écrie Marianette. Oh! je voudrais un chandail, un pantalon ... et puis, une casquette ... et puis, un imperméable quand il pleut.

Grand-père est content: Marianette sait ce qu'il faut acheter.

La vendeuse les aide à acheter tout ce qu'il faut: «Du solide et du pas trop cher, n'est-ce pas?» dit-elle.

— Avez-vous des bottes, petite fille? demande-t-elle à Maria­nette.

— Des bottes? non!

— Mais il faut avoir des bottes! s'écrie le grand-père. Surtout quand il pleut. Donnez-nous de bonnes et hautes bottes, mademoi­selle.

— Et un parapluie, grand-père?

— Et un parapluie! Prenons le parapluie qui est comme une fleur rouge et noire.

Marianette ouvre le parapluie, elle le regarde, elle est très con­tente.

— Tu aimes lire, Marianette?

— Oh! oui.

— Alors, allons acheter des livres. Des manuels et d'autres livres.

— Tu es en septième, je pense?

— Oui, je suis en septième.

Ils achètent beaucoup de livres, des cahiers, des gommes, des crayons, des stylos, des plumiers et tout ce que veut avoir une petite écolière de neuf ans.

— Et pour toi, grand-père, tu n'achètes rien?

— Moi? Mais je n'ai besoin de rien!

— Et pour cette cousine Madeleine qui sera ma grand-mère?

— Mais, cousine Madeleine n'a besoin de rien, elle non plus.

— Il faut acheter un petit cadeau souvenir, grand-père. Tu sais, quand on revient de voyage, on apporte des petits cadeaux....

Grand-père Henri regarde les beaux yeux bleus de Marianette. C'est le regard de Claire ... et de sa femme Marianette ... et regardant sa petite-fille, il commence à ressentir plus durement leur perte.

Il donne de l'argent à Marianette et lui dit:

— Tiens! achète toi-même ... Moi, je ne sais pas ... La petite a acheté une belle écharpe large et longue.

— C'est beau! dit grand-père Henri.

— Voilà la monnaie, grand-père.

— Je te la donne. Mets-la dans ton petit sac.

— Tu me la donnes? Oh! merci. Attends-moi. Je vais vite re­venir.

«Elle va acheter des bonbons! pense grand-père. Tous les enfants du monde achètent des bonbons avec l'argent qu'on leur donne.»

Tous les enfants du monde achètent des bonbons, peut-être! Mais pas Marianette aujourd'hui. Elle revient et donne un paquet à grand-père Henri.

— Pour toi, grand-père. Je suis très contente de te faire un cadeau.

Il prend le paquet et l'ouvre.Une blague à tabac!

Une blague, peut-être un peu petite, peut-être pas aussi commode que la vieille bonne blague qu'il a dans sa poche ... Mais la petite fille sourit, elle attend la- joie du grand-père avec des yeux grands.

Il la prend dans ses bras et s’écrie:

— Ça, c'est une bonne idée! Quel beau cadeau!

Et il l'embrasse.

Il l'embrasse même deux fois.

Marianette rit. Elle est heureuse enfin.

Et lui aussi, il est heureux, grand-père Henri.

Mais il est inquiet en même temps. Où va-t-il coucher cette petite fille? Et que va-t-il lui donner à manger? Une petite fille de neuf ans, est-ce qu'elle peut manger comme lui? Bien sûr que non! ... C'est vrai qu'il y a cousine Madeleine qui mange des ome­lettes, des purées, des compotes de fruits. Elle préparera les repas pour la petite. Elle la lavera, la soignera, l'élèvera. Cousine Made­leine le fera avec plaisir. Et lui, il se promènera avec elle, il lui apprendra à faire des problèmes, il lui parlera des plantes et des animaux et lui enseignera la géographie, le français, l'histoire et beaucoup de choses intéressantes. Mais ... il faut la distraire. A cette idée grand-père Henri est inquiet à nouveau. Comment dis­traire une petite fille de neuf ans à Coule-Vent où il n'y a pas d'enfants pour jouer?

Ces tristes idées préoccupent père Henri. Ah! Pourquoi sa fille travaillait-elle comme hôtesse de l'air? ... Pourquoi s'est-il dis­puté avec sa fille? Pourquoi vivait-il loin de sa fille Claire et de sa petite-fille? Et maintenant, il ne connaît pas du tout la petite Ma­rianette qu'elle lui laisse ... Elle n'est pas venue en vacances à Coule-Vent, et il ne sait ce qu'elle airne et ce qu'il faut faire. Ils n'ont pas en commun le souvenir des joies des vacances passées ensemble. Mais c'est fini: C'est irréparable. Il lui reste seulement à rendre Marianette heureuse ... Marianette le regarde, inquiète.

— Tu n'es pas triste, hein, grand-père? Il lui sourit, et il l'embrasse à nouveau.

Соседние файлы в предмете [НЕСОРТИРОВАННОЕ]